lundi 15 avril 2013

Le lieu"magique" de mon enfance.

Moulin de la Tourre vu du jardin
Dans le nord Aveyron, il est un petit ruisseau nommé le Bonance, ce ruisseau prend sa source dans les Monts d'Aubrac. Juste avant de rejoindre la rivière du Lot il alimentait le Moulin de La Tourre situé sur la commune de Pomayrols, Ce moulin existait déjà au XVII ème siècle.

C'est dans ce décor à la fois champêtre et verdoyant bercée constamment par le bruissement de la rivière et de la chute d'eau que j'ai vécu mon enfance. Notre maison était située à l'étage du moulin.
J'ai toujours était émerveillée par l'ingéniosité de mon père et sa force à mettre en œuvre des idées nouvelles.Au retour de la guerre de 1914, il avait dû remonter les murs du moulin et remettre les turbines en marche.
A partir du vieux moulin de la Tourre
un canal souterrain avec un réservoir
acheminait l'eau sur les turbines.

Les années suivantes il imagine avec un de ses amis de St Geniez d'Olt qu'il pourrait produire de l'électricité pour tout le village. Il détourne alors une partie du ruisseau, pour créer une chute d'eau qui pouvait faire fonctionner à la fois le moulin et, avec un système de poulie, une dynamo !
Et la lumière fût !!!
L'E.D.F. ne pouvait pas encore desservir la région c'est pourquoi le 8 mai 1929 la préfecture de Rodez accorda à mon père un contrat de quarante ans. Mon père assura ce contrat jusqu'en 1955 lorsque l'E.D.F. vint prendre la relève.

Village de Pomayrols
Le petit village de Pomayrols : une trentaine de familles bénéficia durant tout ce temps du confort de l'électricité. Quels changements !!! Quelle merveille de ne plus travailler à la bougie !!!
Des habitations, autour du village n'avaient pas ce privilège tandis qu'à la maison nous pouvions en jouir sans limites...
Dans mon enfance j'étais éblouie par la fée électricité. Je ne comprenais pas comment à partir d'une simple chute d'eau et d'une machine, la lumière pouvait jaillir !
C'était le début d'une nouvelle manière de vivre...

Bien plus tard j'ai vécu six ans en Afrique Centrale où j'ai retrouvé la vie quotidienne sans le confort d'électricité...

La chute d'eau du ruisseau
Bonance, source d'énergie
Lors des premiers congés payés, après 1936, Pomayrols vit arriver des estivants, qui augmentaient beaucoup la population. Les mois d'été, la chute d'eau n'était pas suffisante, l'intensité du courant baissait et il fallait changer les ampoules. Pour limiter ce problème mon père avait mis en place une tactique pour doubler la chute d'eau aux heures de pointe.
A tour de rôle, enfants, nous allions mettre une vanne en bois, entre deux rochers, pour détourner l'eau dans les prairies. Matin et soir il fallait y retourner, ce parcours reste profondément gravé dans ma mémoire. Il m'arrive souvent de rêver que je marche dans ces parcelles de  prairies au bord du ruisseau, au rythme des petites cascades. C'était à celui d'entre nous qui irait le plus vite pour faire l'aller- retour. Si nous mettions trop de temps nos parents s'inquiétaient, c'est vrai que la manipulation était risquée, en posant la vanne nous risquions de glisser dans le ravin.

Entrée
du moulin de la Tourre
J'étais la sixième d'une famille de sept enfants vivant sur une toute petite exploitation. Le moulin assurait un bon complément pour subvenir à nos besoins. Plusieurs meules broyaient les céréales pour les animaux, mais aussi le froment pour la farine à faire le pain, celui-ci était cuit sur place.
Meules broyant les céréales.
Pendant les années de guerre de nombreux clients venaient se ravitailler chez nous, de jour comme de nuit …

Ces années m'ont marquées par l’entraide fraternelle que nous vivions, chacun donnait tout son possible. Pour répondre aux besoins de nos voisins nous fabriquions l'huile de noix et de noisette avec les cerneaux. Mon père avait installé une petite meule pour les moudre, en faire une pâte à cuire que nous passions au pressoir. ( Un litre d'huile pour deux kilos de cerneaux de noix et un litre pour trois kilos de noisettes). Plusieurs centaines de litres étaient pressés durant l'hiver...
Toute cette activité artisanale me semble aujourd'hui faire partie d'un autre monde.

 Ecoute le bruissement de l'eau qui s'écoule
Viens puiser à sa source, la joie d’être en vie !



Je garde de bons souvenirs de ce temps là, ils sont comme des sources d'énergie et de bonheur de vivre...

Irma B.

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